>>Seul<<
Alors que l’horizon se voilait de rouge, alors que l’air se refroidissait, alors que le vent faisait voleter les grains de sable, Ali pensait à la journée de demain, assis au haut d’une dune. Il faisait partie d’un peuple nomade du désert et chaque année se déroulait une fête importante. Demain, plusieurs jeunes hommes devaient s’affronter dans diverses épreuves. Le vainqueur serait reconnu par la tribu comme « étant devenu un homme ». Cette année, Ali y participerait. Les épreuves étaient difficiles et il avait besoin de se retrouver seul pour faire le vide autour de lui et en lui. Deux autres garçons devaient concourir : Djalil et Narman. Djalil ne lui faisait pas peur, il était le plus jeune des trois et le plus chétif. Quant à Narman c’était une toute autre histoire. Cela faisait plusieurs mois que son père l’entraînait pour qu’il devienne le plus fort, le plus résistant et le plus futé. Ali n’était pas le plus le fort, le plus résistant mais sûrement le plus futé. Mais cela suffirait-il ? Toute sa famille comptait sur lui car c’était un honneur pour les parents qu’un de leur fils devienne enfin un homme.
>>Que les épreuves commencent<<
Toute la tribu s’était levée aux aurores. Personne ne voulait rater l’évènement. L’ancien du peuple annonça la première épreuve.
- « Que les trois jeunes garçons s’approchent ! ... Votre première épreuve sera celle qui jugera de votre intelligence. Je vous poserai trois questions à chacun. Celui qui me formulera les meilleures réponses gagnera le premier point. »
Ali gagna cette épreuve, il était plus malin que les autres et c’était là son plus grand atout. Il se sentait confiant pour la suite des épreuves.
La seconde épreuve était une épreuve de combat. Les trois jeunes s’affrontaient en même temps et à main nue. Djalil fût très vite éliminé, il n’était pas assez résistant pour endurer les coups et abandonna au bout de quelques minutes. Tout se joua entre Ali et Narman. Ils se frappaient, se jetaient à terre, et la foule était impressionnée par la brutalité du combat. Alors que leur visage était ensanglanté, Narman porta un coup dans le ventre d’Ali qui tomba lourdement sur le sol poussiéreux. Ali était vaincu. Comme l’épreuve avait été très rude pour les concurrents, l’ancien de la tribu décida de reporter l’ultime épreuve, qui les départagerait au lendemain.
La dernière épreuve était une course d’orientation. Les garçons étaient emmenés les yeux bandés dans un lieu qui devait leur être inconnu, différent pour l’un et l’autre. Il devait revenir le plus vite possible au campement. On ne leur laissait qu’une gourde, un peu de nourriture et un chameau. Ali se sentait confiant, bien qu’il soit encore courbaturé de la veille, son père lui avait appris à avoir confiance en son instinct. Mais voilà, la famille de Narman désirait tellement voir leur fils gagner que quelques cousins l’avaient aidé en secret pendant cette épreuve. Il remporta alors le dernier point ce qui faisait de lui le nouvel « homme » du peuple nomade.
>>Déception<<
En arrivant au campement, Ali vit et entendit des cris et des chants de joie. Il comprit qu’il avait échoué. Sa mère l’attendait, les yeux remplis de larmes.
- Mère ... pardonnez-moi d’avoir échoué.
- Moi je le peux mon fils, tu pourras retenter les épreuves l’année prochaine, mais ton père...
Lorsqu’Ali s’approcha de la tente familiale, on lui dit que son père ne voulait pas lui parler pour le moment. Ali resta deux jours au campement et s’enfuit. Il ne pouvait pas rester, il avait trop honte et se sentait trop rejeté.
On apprit plus tard que Narman avait triché, alors lui et les siens furent bannis du peuple nomade. Cependant, cela ne changeait rien pour Ali qui depuis n’était pas revenu. Ses parents l’avaient cherché mais en vain. On avait juste entendu dire qu’il avait rejoint un groupe de brigands qui pillaient les villes du désert. Est-ce semble-t-il, la seule manière qu’il avait trouvé pour exister, et se sentir futé, fort et résistant comme un homme.
